« J’ajouterai encore et encore »

 

Inouï ! tout ce que le Seigneur a fait pour David. Il ne manque d’ailleurs pas de le lui rappeler : « Je t’ai consacré comme roi d’Israël, je t’ai délivré de la main de Saül, puis je t’ai donné la maison de ton maître, … Si ce n’est pas assez, j’ajouterai encore autant ».

 

Inouï tout ce que le Seigneur a fait pour chacun d’entre nous. En ce dimanche, il se plaît à nous le rappeler : N’es-tu pas baptisé ? Alors tu es « prêtre prophète et roi«  ; « je t’ai délivré de la main de l’ennemi«  ; « je t’ai libéré de l’esclavage du péché«  ; « j’ai fait de toi mon fils«  ; « je t’ai gravé sur la paume de mes mains«  ; « je t’ai aimé d’un amour éternel«  … et l’on pourrait multiplier ainsi les citations bibliques qui nous martèlent les merveilles opérées par Dieu pour nous dire l’immensité de son amour. N’était-ce pas assez ? Dieu a pourtant ajouté ce qui lui était le plus cher ; il a envoyé son Fils, son unique, qui est mort pour nous sur la croix et qui est ressuscité pour que nous ayons la plénitude de sa vie.

 

Pauvre David qui, malgré les mille attentions de Dieu, a succombé à la tentation et s’est effondré. Son aveu contrit est en pleine consonance avec notre année jubilaire de la Miséricorde. « J’ai péché contre le Seigneur », dit-il. Ne sommes-nous pas, nous aussi, de pauvres pécheurs ? Il nous arrive si souvent de succomber, à l’instar de David. Savons-nous, avec la même humilité, prononcer ces mots si simples et les laisser résonner en vérité au plus profond de notre cœur ? : « J’ai péché contre le Seigneur ».

 

« Le Seigneur a passé sur ton péché, tu ne mourras pas », lui certifie le prophète Nathan. Quelle merveille de la Miséricorde de Dieu ! Pouvons-nous nous en priver ? Qu’il est doux d’entendre le prêtre, en chaque rencontre dans le sacrement du pardon, nous dire :  » Tes péchés sont pardonnés ; tu ne mourras pas « . Celui qui croit en moi, qui croit en ma Miséricorde, même s’il meurt, vivra ».

 

Voyez la pécheresse de l’Evangile. Son attitude envers Jésus atteste qu’elle a un cœur contrit. Tous ses gestes disent : « J’ai péché contre le Seigneur ». Et la voilà qui repart, guérie, la joie dans le cœur : « Ta foi t’a sauvée, lui dit le Christ. Va en paix ! »


Tu as péché, nous dit le Seigneur ? Tu regrettes et tu reviens vers moi ? Sois en sûr ; après tout ce que j’ai fait pour toi, « si ce n’est pas assez, j’ajouterai encore« . Oui j’ajouterai l’amour à l’amour, la miséricorde à la miséricorde.


Il y a quinze jours, je célébrais le baptême d’un petit de deux ans. Le début de la célébration fut assez mouvementé. Un petit de deux ans, ça a besoin de bouger, de gambader, de donner de la voix. Au moment du baptême lui-même, alors que je versais l’eau sur le front de ce bambin, celui-ci me fit un large sourire et resta des plus sages jusqu’au terme de la cérémonie. Tous s’en émerveillèrent. Les registres étant signés et les participants se préparant à sortir de l’église, ce petit s’empara soudain du cierge du baptisé que l’on avait éteint et alla tranquillement le rallumer en se servant des lumignons qui brillent devant la statue de la Vierge. On le vit revenir vers nous, le visage tout illuminé. Quelques instants après, les parents éteignirent à nouveau le cierge mais le petit, une fois encore, gambada jusqu’aux lumignons de la Vierge et le ralluma ; sa démarche se répéta de la sorte une troisième fois. Quelle leçon pour nous ! On peut toujours revenir vers le Seigneur pour rallumer la flamme de notre baptême. Il ne faut jamais se résigner ni se décourager. Toujours, toujours, il est le Dieu de Miséricorde et d’amour.

 

En ce dimanche, Nicolas, Arnaud, Joseph, Louise, Louis, Elison-Lucas et Devon-Pierre, âgés de 8 à 15 ans, reçoivent le sacrement du baptême. Dieu leur a donné la vie ; voilà maintenant qu’il leur donne d’être ses fils et filles, d’être prêtres, prophètes et rois. Dans leur cheminement de foi et tout au long de leur vie, il ajoutera encore, n’en doutons pas. Certes, ils sont pleins de ferveur ; comme David et comme nous, ils feront pourtant l’expérience de leurs fragilités et de leurs péchés. Mais, nous l’espérons, toujours ils reviendront vers le Seigneur pour rallumer la flamme de leur baptême, disant humblement : « J’ai péché contre le Seigneur », et recevant encore et encore les flots d’amour du Dieu de toute miséricorde, ils ne mourront pas ; ils vivront.

 

Père Gilles Morin, curé

Lève-toi

 

Parmi les drames qui frappent les parents, le décès d’un enfant est l’un des plus terribles. Spontanément, nous pensons à la mort physique. Voir un corps tant aimé, la chair de notre chair, demeurer là, inanimé, il y a de quoi s’effondrer ou se révolter.

 

Pensons à cette pauvre veuve de Sarepta dont nous parle la première lecture de ce dimanche. N’avait-elle pas accueilli le prophète Elie, alors qu’il ne lui restait qu’une poignée de farine dans une jarre et un peu d’huile dans une cruche ? Certes, jarre de farine ne s’était point épuisée et cruche d’huile ne s’était point vidée, mais à quoi bon se nourrir ainsi miraculeusement si c’est pour voir mourir son fils prématurément. Comment ne pas s’en prendre au prophète : « Tu es venu chez moi pour faire mourir mon fils ! », lui lance-t-elle. Et Elie de lui faire cette demande stupéfiante : « Donne-moi ton fils ! ». Elle aurait pu légitimement se récrier et refuser. Parce qu’elle a accepté, elle a pu s’entendre dire : « Regarde, ton fils est vivant ».

 

Pensons à cette autre femme, La femme et La mère par excellence : la Vierge Marie. Au pied de la croix, elle donne … avec son fils elle s’offre. Son fils a multiplié les pains, guéri des malades, ressuscité des morts. A quoi bon tout cela si c’est pour mourir lui aussi prématurément et si ignominieusement. Mais au matin de Pâques, Jésus se lève ; il sort du tombeau, lui le Vivant à jamais. « La mort est vaincue par la vie ». Ne sommes-nous pas fils et filles de Marie ? Imaginons ce qui résonne dans son cœur lorsqu’elle nous voit mort … non point d’abord d’une mort physique mais rongé par la mort spirituelle, celle de l’âme, celle qui peut conduire à la mort éternelle. Marie veut toujours nous donner à Jésus pour pouvoir s’entendre dire : « Regarde, ton fils est vivant ; ta fille est vivante ». Cette parole retentit en son cœur et suscite sa joie chaque fois que nous recevons le sacrement de Réconciliation qui est une résurrection. S’il est une parole que le Christ veut nous adresser, c’est bien celle-là : « Donne-moi, donne-moi ta misère et ton péché ; puis lève-toi et vis de ma vie, sois dans ma joie ».

 

L’une de nos paroissiennes m’a confié ce fait qui remonte à quelques mois. Elle participait à une messe de mariage. En cette année de la Miséricorde, tout naturellement le prêtre fit porter son homélie sur le thème du pardon dans le couple et de la splendeur de la Miséricorde Divine. Au terme de la célébration eucharistique, il osa. Oui, avec une audace peu commune, il osa. « Nous allons nous retrouver pour le vin d’honneur, dit-il en substance. Je serai à la disposition de tous ceux qui veulent se confesser. Vous me verrez ; n’hésitez pas à venir vers moi ». Effectivement, se tenant à l’écart dans la prairie, il passa sa soirée à accueillir les pénitents. Ce fut un défilé ininterrompu, pas d’abord celui des pieuses dames mais celui des « gros poissons », comme on dit … ceux qui n’avaient pas eu recours à ce sacrement depuis des années. Ce mariage, fête de l’amour, devint ainsi et aussi fête de la résurrection pour tous. Combien la Vierge Marie devait exulter ! Jésus lui répétait : « Regarde, tes fils et filles qui étaient morts sont vivants ».

 

Et nous, par-delà notre état de santé, vivons-nous vraiment ?

 

Père Gilles Morin,

Curé