Ce vendredi 23, juste avant la messe de 19h00, notre sacristain me faisait cette remarque d’un air dépité et scandalisé : « Dans les média, Noël c’est les cadeaux et la bouffe ». Je comprends sa réaction et sous bien des angles, je la partage … et pourtant…
On peut se livrer à ce douloureux constat. La pauvreté et la simplicité de la Nativité devant laquelle nous nous émerveillons ont fait place à un étalage de luxe et une dynamique de consommation que nous dénonçons. La gratuité du don infini de Dieu qui nous laissait ébahis a été balayée par la spirale du commerce et du profit. On cherche à nous distraire, à nous dissiper, à nous détourner de l’essentiel, et finalement à nous spolier du plus précieux des trésors, à savoir l’Enfant-Dieu, l’Emmanuel, le prince de la paix. Ce sont les petits et les pauvres qui sont ainsi insidieusement sacrifiés. Pour eux, ni table bien garnie ni cadeaux luxueux. Que leur reste-il, ou plus exactement qui leur reste-t-il ? Jésus ! Je suis donc porté à m’écrier : « Ne leur volez pas, ne nous volez pas Jésus ; ne portez pas atteinte à cet enfant ; ne l’ôtez pas de notre vie de tous les jours ; ne défigurez pas et ne désacralisez pas Noël ; nous avons tant besoin de Sa Lumière ; nous ne pouvons vivre sans Amour, et l’Amour, c’est Jésus. Non, Noël, ce n’est pas les cadeaux et la bouffe ; Noël, c’est la naissance de Jésus « .
Et pourtant … oui, pourtant il y a en arrière-plan une grande vérité que tant de nos contemporains semblent avoir oublié. C’est qu’effectivement, Noël nous porte Le Cadeau par excellence, à savoir Dieu lui-même. « Pour toi, prêchait Saint Augustin, Dieu s’est fait homme ». C’est inouï, c’est fabuleux ; voilà qui devrait nous laisser ébahis : « Pour moi, Dieu s’est fait homme … oui, pour moi, pour nous, pour tous… ». Ce Cadeau n’a pas de pareil ; il n’est pas à acheter, il est à accueillir ; il se présente à nous tel un enfant. C’est le Fils éternel du Père, le Verbe de Dieu … « et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous ». Et oui, il s’est fait chair ! Noël est aussi l’annonce d’un festin. Le mot hébreu qui signifie « agneau » est celui-là même qui signifie « enfant ». Le petit qui nous vient dans la nuit de la Nativité est déposé dans une mangeoire. Il vient pour être mangé : il est le pain vivant descendu du Ciel. Celui qui mange de ce pain n’aura plus jamais faim ; il est pain de vie éternelle.
Notre sacristain, l’autre soir, n’avait pas totalement tort ; il n’avait pas non plus totalement raison. Cet étalage de cadeaux et de bouffe que nous présentent nos média n’est-il pas, finalement, l’expression d’un désir inavoué ou inconscient, … celui du seul cadeau capable de combler et de la seule nourriture qui rassasie pour la vie éternelle ? Que nous le voulions ou non, Noël ce n’est pas les cadeaux et la bouffe, mais c’est bel et bien » Le cadeau et La nourriture « . Conclusion : Chaque messe est un Noël. Surtout, ne nous en privons pas.
Père Gilles Morin
Curé