Attendre tellement

Elle l’attendait ; elle l’attendait tellement. Qui donc ? Le Messie, bien sûr. Avec tout le peuple d’Israël, elle connaissait les prophéties, elle suppliait son Dieu : « Ah, Seigneur, si tu déchirais les cieux, si tu descendais … ». Elle était comme l’écrin resplendissant, préparé de toute éternité, pour accueillir et donner au monde le Sauveur. Elle avait pour joli nom : Marie ! Elle était de Nazareth, en Galilée.

 

Elle l’attendait ; oui Marie attendait cette femme dont la descendance devait écraser la tête du serpent, cette vierge dont le prophète Isaïe affirmait qu’elle enfanterait un fils auquel elle donnerait le nom d’Emmanuel, Dieu avec nous. Mais Marie, cette femme, cette vierge, c’était toi. La route de ton cœur était aplanie, pas de ravin ni de colline, rien de tortueux ni d’escarpé … tout était prêt, tellement prêt … et ton « Fiat » a retenti … et en ton sein, le Sauveur est descendu sur notre terre.

 

Elle l’attendait ; oui, Marie l’attendait tellement. Quoi donc ? La naissance de son enfant, bien sûr. Elle voulait le contempler, l’admirer. Depuis le jour de l’annonciation, neuf mois durant, Marie redisait son « Fiat !». Tout son être était dans une attente impatiente : « Viens, Toi, Lumière et Salut du monde … Toi, mon créateur et mon Sauveur. Viens mon petit enfant !…» 

 

Ils l’attendaient eux-aussi ; oui, tant de contemporains de Marie attendaient un libérateur, un sauveur. Ils connaissaient les prophéties, mais leurs cœurs étaient ravinés et cabossés,  tortueux et sinueux. Au jour le jour, pas d’impatience de la venue du jour de Dieu, pas de « Fiat !». À Bethléem, les Cieux vont s’ouvrir, le Verbe va se faire chair, mais leurs yeux ne verront pas, leurs oreilles n’entendront pas, leurs cœurs ne s’ouvriront pas.

 

Ils sont nombreux à ne pas l’attendre, de nos jours encore, soit par ignorance soit par négligence. Tant de nos contemporains ne savent plus ce qu’est Noël ! Comment, dès lors, s’y préparer ? Rappelons-nous ce commerçant sollicité pour installer une crèche en vitrine et qui avouait : « Je ne sais même pas ce qu’il faut mettre dedans ». Tant de nos contemporains ont le cœur trop encombré, trop bosselé, trop ravagé. Dans une société de l’instantané, du caprice, du tout tout-de-suite, il y a carence d’espérance. Attendre qui ? Attendre quoi ? Pris dans le tourbillon incessant et stressant du quotidien, il devient tellement insupportable de devoir attendre, fut-ce « un ciel nouveau et une terre nouvelle ».

 

Nous l’attendons, nous, le Sauveur du monde. Nous affirmons qu’il est déjà venu et qu’il reviendra ; nous savons que dans la nuit de Noël, il cherchera doucement à trôner en nos cœurs. Il faudrait donc qu’en nous, tout soit prêt, tellement prêt ; que nos « fiat » au jour le jour aplanissent nos routes, comble nos ravins, abaisse nos montagnes … et que de tout notre être, nous puissions lancer ce cri avec Marie et en Eglise : « Viens, Seigneur, et Sauve-nous !»

 

Jeudi, nous fêterons la Vierge Immaculée. Ce sera la fête patronale de notre paroisse. Comment mieux nous préparer à Noël qu’en suivant Marie, en l’imitant, en la priant ?

Marie ! nous te le demandons : « Console ton peuple, tes fils et tes filles. Console-nous. Redis à notre humanité : « Voici votre Dieu, voici le Seigneur Dieu … il vous porte sur son cœur « ».

  

Père Gilles Morin

Curé